Introduction

Ce qu'il faut savoir avant de se lancer :
Se compléter, se coordonner, s'articuler

"Le côté mille-feuilles de ces protections, extension du parc et Natura 2000 en mer, agace. Vous le comprenez ?"

 Extrait de l'article « Jean-Pierre Nicol : "On ne veut rien sanctuariser !" »
Publié sur www.varmatin.com, le 16 novembre 2008

En France, l’organisation de la protection de la nature n’est pas toujours facile à appréhender : comment faire comprendre que le « mille-feuilles » de statuts qui se superposent parfois sur un même territoire, peut avoir un sens ? C’est pourtant le cas : par exemple, un parc naturel marin (outil contractuel), défi ni sur une vaste superfi cie, peut très bien héberger en son sein une ou plusieurs réserves naturelles (outil réglementaire) qui correspondent à une volonté de protection forte et pérenne de certains espaces.
Toutefois, pour asseoir la légitimité de ce type de superposition spatiale, il convient d’être capable d’en expliquer la cohérence et la justifi cation. Il peut aussi être nécessaire ou opportun de rechercher un meilleur fonctionnement des dispositifs existants sur un même territoire ou de les mettre en synergie : cela peut par exemple conduire à une simplifi cation des dispositifs de gouvernance ou à une suppression des redondances, une mise en cohérence des périmètres, une mise en commun de moyens techniques de terrain ou d’analyse, tout en prenant en compte, en respectant, voire en s’appuyant sur les particularités de chacun de ces outils.
 

Ce besoin de compréhension de l’articulation mise en place localement est souvent exprimé par les représentants d’usagers et les élus concernés sur leur territoire. En outre, cette problématique est au coeur des préoccupations des gestionnaires d’AMP eux-mêmes qui recherchent la meilleure articulation possible (entre eux pour la gestion, avec les décideurs pour la gouvernance, etc.).
Plusieurs questions se posent : comment valoriser et respecter la complémentarité des outils de protection, leur histoire, tout en clarifi ant la gouvernance, et en cherchant à mutualiser l’organisation et les moyens de chacun ?

Aujourd’hui, dans le contexte de modernisation de l’action publique, de réformes visant à la simplifi cation des outils de protection des espaces naturels, il est nécessaire de travailler ensemble : se concerter, se coordonner, articuler les outils pour une gestion intégrée des territoires, afi n de répondre plus effi cacement aux objectifs de protection et aux enjeux d’évolution du milieu marin et de son utilisation. Enjeux pour lesquels la France est engagée pour l’ensemble des politiques publiques.

 

 
METROPOLE ET OUTRE-MER

Qu’en pensent les gestionnaires ?

Témoignage d’Emmanuel Caillot, Réserves naturelles de France,
en charge du développement de l’Observatoire du patrimoine naturel littoral RNF-AAMP

« La question de l’articulation des aires marines protégées s’est posée avec l’arrivée de l’outil parc naturel marin, qui, au-delà d’être perçu comme une AMP supplémentaire dans le paysage local de la protection de la nature, doit être un dispositif fédérateur entre les AMP et tous les acteurs du territoire d’emprise. Ce nouvel outil doit permettre d’aller plus loin en matière de protection du patrimoine naturel littoral et marin, tout en intégrant d’autres finalités qui dépassent la protection stricte et intéressent “l’utilisation durable du territoire’’ par l’ensemble des acteurs.

L’idée que je me fais d’une bonne articulation repose sur l’association d’acteurs variés pour des projets construits et portés en commun et dont le portage est avant tout défini pour son efficacité : en renforçant par exemple ce qui est déjà porté par des AMP existantes sans pour autant leur en ôter le pilotage ; en complétant les actions en cours en matière de gestion et protection du patrimoine naturel pour une meilleure prise en compte d’enjeux marins encore mal connus ; en choisissant le mode de gouvernance le plus adapté, etc. Cette articulation, recherchant avant tout l’opérationnalité, doit aussi s’imaginer dans des contextes sans parc naturel marin à des échelles de réflexion adaptées à chacun des enjeux du territoire.
 

Il me semble que ce guide doit viser cet idéal qui in fine, se détermine au cas par cas : l’articulation est étroitement liée aux contextes locaux (périmètres de portage des AMP historiques, souvent bien plus large que le périmètre classé ; niveau d’acceptabilité par l’ensemble des acteurs ; légitimité et reconnaissance institutionnelle, etc.) qui peuvent être très différents. Enfin, il faut aussi rappeler que cet équilibre recherché repose avant tout sur la qualité des relations humaines qui, en fonction des personnalités des principaux leaders locaux, vont véritablement dimensionner la portée (l’acceptabilité) des actions menées en faveur du patrimoine naturel marin et au final leur appropriation (portage commun).

Pour résumer, une articulation réussie pourrait être proche de la mise en réseau des AMP d’un même territoire fonctionnel, au sens écologique mais aussi culturel, pour inclure l’ensemble des acteurs autour d’un objectif commun et partagé : celui d’améliorer la qualité environnementale du territoire et de définir ensemble une gestion durable des ressources naturelles, intégrant les activités humaines.

 

Le résultat d’une bonne articulation pourrait concrètement se traduire par la définition d’objectifs à long terme partagés par l’ensemble des acteurs sur un même territoire. Ces finalités seraient définies selon le rôle fonctionnel de chaque AMP pour une gestion évolutive et des actions cohérentes et complémentaires. En cela, une articulation locale bien pensée devient essentielle pour alimenter les stratégies en faveur de la conservation du patrimoine naturel, notamment celles relatives à la création et à la gestion des AMP : l’amélioration des connaissances du territoire, permettant d’affirmer de nouveaux enjeux, lesquels devront bénéficier d’outils de gestion adaptés.»